Les Français et les Suisses, parmi les plus débiles Européens
L’énigme
L’autre jour, ou plus exactement le 8 novembre, sur le groupe FB Les Amis de la bande dessinée, le groupe !, Jean Brouillard publie l’épisode « Jean Richard enquête » paru dans Pif Gadget n°271 (6 mai 1974), dans une numérisation pire que celle que je vous présente ici, et sans clé :
Le problème
Le concepteur de cette énigme, Gil Das, n’a pas compris le Code de la route. Malheureusement, un bon nombre de Français, et au moins un Suisse, sont dans la même situation, sauf qu’en 2023, pas en 1974.
Mettons que les gens de jadis avaient une excuse. Les panneaux de signalisation AB6 « Route à caractère prioritaire » et AB7 « Fin de route à caractère prioritaire » n’ont été introduits en France que par l’arrêté du 23 juillet 1970, bien qu’ils étaient définis non par la Convention de Vienne sur la signalisation routière du 8 novembre 1968, mais déjà par celle de 1949 ! Bon, c’est connu, les Français s’en battent les couilles de la sécurité routière : les limitations de vitesse sur les routes nationales et l’obligation pour le conducteur et les passagers à l’avant des véhicules de porter la ceinture de sécurité ont été introduites en France seulement en 1973, et les contrôles techniques des véhicules ont été instaurés en 1992 (comparez cette dernière date avec 1951 pour l’Allemagne, 1960 pour l’Autriche, 1974 pour la Belgique, 1982 pour l’Italie, 1985 pour la Suisse). En 1974, on pourrait comprendre, à la limite, que la signification du panneau AB7 soit mal connue par le public. Mais en 2023 ?
Je vais reprendre ici les commentaires qui prouvent combien de gens n’ont rien compris du Code de la route, et on en discutera après :
■ Seb Richard : J’opte aussi pour la peinture rouge du camion. Mais aussi, au vu du panneau sur la 4e vignette, l’accusateur devait laisser la priorité, il me semble.
■ Nolino Nolino : Non, le panneau de circulation, losange Jaune barré… fin de route à caractère prioritaire, donc il n’y a pas refus de priorité ^^ .
■ John Clark : C’est la règle de la priorité à droite qui s’applique. Le camion vient de la gauche, la voiture est abîmé sur la gauche, cela semble à refus de priorité du camion. Mais je ne vois pas.
► Claude Aubert : Faux, 😃😃😃
► Claude Aubert : complément, 😃 la cox a un panneau de perte de priorité sur sa droite… donc, la cox est fautive 😁😁… vu ? Cordiales salutations.
► Claude Aubert : pour la Suisse, le panneau perte de priorité donne automatiquement la priorité au autre usager qu’il viennent de droite ou de gauche.■ Frédéric Serres : Le panneau sur l’image de l’accident indique clairement que la voiture n’avait pas la priorité, contrairement à ce que prétend son conducteur.
■ Eric Hentzschel : Refus de priorité au camion puisque la voiture n’a plus la priorité après le panneau.
► Moi : Elle n’avait plus de priorité automatique (vu le panneau), mais alors c’est la priorité à droite qui s’applique, et la Cox vient de la droite du camion. Ce que je trouve bizarre est qu’aucun autre panneau n’y est présent, soit céder le passage, soit l’octogone STOP (quand on n’a plus de priorité, normalement l’un des deux est utilisé, sinon c’est la priorité à droite, car tous sont égaux). L’énigme est maladroitement conçue. Vous les Français, vous ne connaissez pas votre Code de la route.
► Eric Hentzschel : non, le panneau indique qu’il perd la priorité. Donc l’autre voie est prioritaire. Pour une priorité à droite on aurait un triangle avec une croix X.
► Moi : Dans d’autres pays, ce panneau indique la fin de la route prioritaire, pas la perte totale de priorité. Donc, on n’est plus prioritaire, mais on est tous égaux. Pourriez-vous m’indiquer l’article de loi disant que l’autre voie est automatiquement prioritaire ? Remarquez que l’autre voie n’a aucun panneau qui indiquerait sa priorité ! Le panneau avec x en triangle est recommandable, mais il n’est pas toujours présent dans le monde réel. De toute façon, sans indication de priorité, c’est la priorité à droite.
► Moi : On voit dans l’autre sens de la route principale un triangle, mais de dos, ce qui n’est pas suffisant. Dans le sens de circulation du camion, apparemment, il n’y a aucun panneau.
Lorsqu’on perd un privilège, on est égal, on n’est pas discriminé, même en ce qui concerne la priorité routière. Celui qui a conçu cette énigme n’a pas compris le Code de la route, et la plupart des conducteurs français non plus. Ne venez pas conduire en Allemagne, SVP.■ David Wiame : Le panneau de signalisation signifie “fin de route prioritaire” donc la voiture n’avait plus la priorité à ce carrefour.
■ Pierre Bastian : (indique la vignette avec le panneau « fin de route prioritaire »)
■ Claude Grandiere : Michel Fugain n’avait pas la priorité…
Note importante
Sachez que, avant d’écrire ce billet, je me suis consulté avec des conducteurs expérimentés, voire très expérimentés. Des Roumains, pas des Français ! Mais je savais déjà que ma logique est bonne, et ceci, pour trois raisons.
Primo. Bien que je ne sois un conducteur expérimenté, je connais la signalisation routière depuis mon enfance. Mon père a représenté la Roumanie à la Convention de Vienne sur la signalisation routière du 8 novembre 1968, et j’ai pu lire le texte de la Convention en français avant de lire le Code de la route roumain et avant que je n’examine les problèmes de priorité de passage.
Deuzio. Bien que chaque pays ait choisi d’adopter seulement une partie des panneaux et panonceaux de signalisation routière prévus par la Convention, le principe est celui de l’uniformité : si un pays reconnaît un panneau, il doit avoir la même signification que dans les autres pays signataires de la Convention. Sinon, on ne pourrait pas avoir un permis de conduire européen, si chaque pays aurait ses propres règles.
Certes, il y en a des petites différences, comme dans le cas de l’aspect du panneau « Stop » (de gauche à droite) en France, Italie, Allemagne et Roumanie :
Tertio. Sans être dans le spectre (TSA), ou pas plus que les autres, je fonctionne comme un compilateur de code source, ou comme un interpréteur. C’est-à-dire, je prends en compte seulement les définitions existantes, dans l’ordre de précédence (ou de priorité) établie. Je ne suppose, je ne présume rien d’autre. Je n’invente rien. Si quelque chose n’est pas défini, ou est défini de manière ambiguë, c’est la cata. C’est d’ailleurs ce qui est évalué par les tests de compréhension employés dans les examens de niveau de langue, dans les étapes éliminatoires pour l’embauche, au bac, etc. : il ne faut rien ajouter, mais seulement utiliser l’information transmise par le texte examiné.
D’ailleurs, selon moi, il y a quelques catégories de gens qui devraient fonctionner de cette manière exacte, précise, et sans aucune supposition :
- Les mathématiciens, qui font leurs démonstrations uniquement à partir des postulats et des axiomes, et des théorèmes déjà prouvés.
- Les juristes, qui devraient être capables de corroborer les divers textes normatifs dans leur intégralité pour arriver à la conclusion logique qui en résulte.
- Les informaticiens (développeurs, programmeurs), qui devraient être capables d’élaborer des logiciels qui soient compilés ou interprétés sans erreurs et qui, dans leur fonctionnement, effectueraient les opérations désirées, et rien d’autre.
Le dernier cas est utopique, mais bon, je l’ai mis là. C’est l’ordinateur qui a toujours raison, car il fait ce que le code dit, pas ce que le code devrait dire.
Explications
Comme je l’avais expliqué déjà, sans qu’on me prenne au sérieux, le panneau AB7 « fin d’une route à caractère prioritaire » a la seule signification de perte de la priorité automatique. Lorsqu’on perd un privilège, on devient l’égal ses autres, on n’est pas discriminé, même en ce qui concerne la priorité routière.
La Coccinelle n’avait plus de priorité automatique, mais alors quoi ? Allons voir sur Ornikar, une auto-école en ligne :
Les usagers doivent cependant faire preuve de prudence lorsqu’ils rencontrent le troisième panneau, car il met fin au caractère prioritaire de la route. Aussi, le conducteur devra être particulièrement vigilant quant à la signalisation pour connaître les règles de priorité.
Analysons ça plus en détail.
En rencontrant un carrefour, un véhicule bénéficie d’une priorité automatique dans la présence de n’importe lequel des panneaux suivants :
Inversement, un véhicule doit céder le passage lorsqu’il rencontre un des panneaux suivants :
Dans l’absence de tout panneau de priorité, c’est la priorité à droite qui s’applique ! C’est la règle d’or de la circulation routière !
Il y a un truc sympa ici, qui pourrait déconcerter les Français, mais on le trouve écrit en toutes lettres dans le Code de la route allemand (StVO) : le panneau AB7 (qui en Allemagne est 307) n’est pas obligatoire, car la validité du panneau AB6 « route à caractère prioritaire » (306 en Allemagne) est annulée par l’apparition de n’importe lequel des panneaux suivants :
Sauf que, bien entendu, tous ces panneaux n’ont pas le même effet sur la priorité de passage. Nan.
Normalement, dans le reste de l’Europe, on fait comme ça :
- à 50 m avant le carrefour, on met le panneau AB7 « fin d’une route à caractère prioritaire », si le panneau AB6 « route à caractère prioritaire » était en vigueur ;
- avant d’entrer dans le carrefour, selon la priorité désirée, on met un de ces panneaux :
Le premier panneau est recommandé pour indiquer que la priorité de passage est celle normale, c’est-à-dire celle qui s’appliquerait même si aucun panneau ne serait présent. Toutefois, s’il est manquant, surprise (non, mais sans blague), c’est la priorité à droite qui s’applique.
La logique du panneau AB1 « priorité à droite » n’est pas celle de dépenser de l’argent pour une signalétique inutile sur les routes à bas trafic (c’est d’ailleurs pourquoi ce panneau peut être absent), mais d’informer le conducteur que, malgré le fait que la route utilisée est (ou paraît) plus large que celle qu’il va rencontrer, elle n’est pas une route prioritaire !
Sinon (mais pas dans notre cas, car ici l’on perd la priorité, on ne va pas la gagner encore une fois, même ponctuellement !), il aurait rencontré un panneau AB2 « priorité ponctuelle » :
Mais, dans ce cas, la route latérale aurait eu un des deux panneaux AB3a « cédez-le-passage » ou AB4 « stop » !
De toute façon, je n’ai jamais vu un carrefour qui n’est annoncé que par le panneau AB7 et rien d’autre. Bon, il y en a un dans notre énigme…
Où en est-on dans notre énigme ? La Cox rencontre le panneau AB7, mais qu’en est-il des autres ?
La route latérale perd son caractère prioritaire (ce qui semble logique si elle va croiser une route plus large), mais y a-t-il d’autres panneaux dans ce carrefour ? Le dessin semble fait en vitesse et sans trop de souci pour la rigueur, car on observe les aspects suivants :
- aucun panneau (« Rien ici ») n’indique au conducteur du camion ou de la caravane une priorité quelconque pour lui ;
- plus loin, dans l’autre sens de déplacement (au point marqué « ?!? »), il pourrait y avoir un des panneaux suivants, mais on ne le saura jamais, car le panneau n’est visible que de dos :
Sauf que non, si le premier panneau était présent, alors on aurait dû montrer un de ces panneaux au conducteur de la Cox :
Il reste alors que, au vu du dessin, le panneau lointain doit être AB1 « priorité à droite ». Je vous entends dire : « Mais le conducteur de la Cox ne devait-il rencontrer un panneau identique ? » Et je vous réponds :
- En principe, oui, mais dans ce cas, le panneau AB7 rétablit la priorité à droite, alors c’est superflu.
- Je l’ai déjà dit, on ne devrait pas faire comme ça, mais plutôt placer le panneau AB7 à 50 m plus tôt, et le panneau AB1 immédiatement avant le carrefour.
- Si un panneau qui devrait être présent fait défaut, désolé de me répéter, c’est la priorité à droite qui s’applique.
Remarque importante : dans la plupart des pays, y compris l’Allemagne (d’où j’ai tiré l’illustration suivante, mais c’est vraiment partout en Europe), on peut rencontrer la signalétique suivante :
On observe que la route prioritaire n’a aucun panneau, notamment aucun AB2 « priorité ponctuelle » ! Plusieurs explications sont possibles :
- La route est déjà sous l’effet d’un panneau AB6 « Route à caractère prioritaire », qui n’est pas rappelé ici. Il sera rappelé après le carrefour (pour ceux qui intègrent la route en venant d’une route secondaire).
- On cherche à renforcer la sécurité routière en forçant les conducteurs de la route principale de ralentir, car ils s’attendent à un carrefour avec priorité à droite. Une fois qu’ils remarquent sur la route de droite, même de dos, un des deux panneaux AB3a « cédez-le-passage » ou AB4 « stop » (identifiables en raison de leur géométrie unique), ils savent qu’ils ne doivent pas céder le passage. De toute façon, j’ai appris à l’auto-école de piger les panneaux des routes latérales croisés, pour apprendre si je dois accorder la priorité ou pas. La signalétique est déficitaire intentionnellement.
En revenant à nos moutons :
Il en résulte que, le carrefour étant à voies égales en priorité, et que la Cox venait de la droite du camion, la Cox avait la priorité de passage, et non pas le camion !
Cabrol et Gil Dans n’ont rien compris au Code de la route (ou au moins, en ce qui concerne le fonctionnement des panneaux AB6 et AB7), alors l’énigme présentée est fautive.
Ce qui est pire, c’est pareil pour un bon nombre de conducteurs français d’aujourd’hui.
Quant à la Suisse…
► Claude Aubert : pour la Suisse, le panneau perte de priorité donne automatiquement la priorité au autre usager qu’il viennent de droite ou de gauche.
Mon œil ! En voici un autre imbécile. Tout comme les Français, il est sous l’impression qu’un panneau dit ce qu’il ne dit pas. En Suisse, « 3.04 Fin de la route principale » :
Les routes principales sont des routes désignées par le signal «Route principale» (3.03), sur lesquelles les conducteurs, en dérogation à la priorité de droite prévue par la loi (art. 36, al. 2, LCR), bénéficient de la priorité aux intersections (art. 37, al. 1).
Les routes secondaires sont toutes les routes dont le début n’est pas signalé d’une façon particulière et sur lesquelles sont applicables les règles générales de circulation (p. ex. la priorité de droite selon l’art. 36, al. 2, LCR).
Tout est évident. En Suisse, le statut institué par le panneau AB6 (3.03 chez eux) ne s’appelle pas « route à caractère prioritaire » mais « route principale ». Une fois que ce panneau n’est plus en vigueur, la route devient secondaire, et l’on applique les règles générales de circulation, par exemple la priorité à droite (on dit « de droite » en Suisse). Sauf le cas où une autre signalétique est présente, ce qui n’est pas le cas.
Rappelons-nous ce qui dit Ornikar au sujet du panneau AB7 :
Aussi, le conducteur devra être particulièrement vigilant quant à la signalisation pour connaître les règles de priorité.
Sauf qu’il n’y a aucune autre signalisation !
Ajoutons le cas de l’Italie :
Fine del diritto di precedenza. Indica la fine di una strada il cui traffico ha diritto di precedenza, con il conseguente ritorno alla norma generale sulla precedenza a destra.
En français : « ce qui entraîne un retour à la règle générale de la priorité à droite. »
CQFD. Y’a plein de crétins sur Facebook. Des Français et des Suisses…
BONUS : L’exception française
Il y a une toute petite exception française en matière de circulation routière. Il s’agit plutôt d’une invention française.
Au niveau du langage, il y a une confusion entre rond-point et carrefour giratoire.
Sémantiquement, le rond-point (traffic circle en anglais) est « une place ronde » genre Place de l’Étoile à Paris (on ne parle pas de priorités ici !), alors que le carrefour giratoire (roundabout en anglais) est un carrefour quelconque (petit ou grand, peu importe) à qui on a ajouté un rond autour duquel il faut tourner. En langage courant, on utilise le terme de rond-point pour les deux cas en France, mais en d’autres langues le mot commun pour les deux cas est la traduction du terme de carrefour giratoire (roundabout, comme je disais, ou en roumain sens giratoriu).
Légalement, il y a la différence suivante en France :
- dans le carrefour giratoire, la priorité est donnée aux véhicules circulant sur l’anneau (on applique une priorité à gauche afin de faciliter la circulation) ;
- dans le rond-point, la règle de priorité à droite est appliquée, ce qui donne la priorité aux véhicules entrant sur l’anneau.
Vu que les Belges sont un peu spéciaux, chez eux le nom « rond-point » est utilisé (par la loi !) pour les cas où la priorité est donnée aux véhicules circulant sur l’anneau, qui est d’ailleurs le seul type de priorité prévu par la loi belge. Mais il y en a des Français qui disent « rond-point », alors qu’ils pensent à un « carrefour giratoire » !
Historiquement, vu que la Convention de Vienne de 1968, qui ne parle que des « croisements giratoires », ne définit nullement les priorités de passage, la France a préféré adopter en 1984 le principe de la priorité à l’anneau.
Je trouve nécessaire de vous faire part de ces pensées :
- Donner la priorité aux véhicules qui entrent est un peu comme utiliser toutes les portes d’un bus pour monter, sans permettre aux passagers de descendre pour faire de place ! Mais bon, les Français et la logique… (La règle de politesse et de bon sens dit qu’à la sortie d’un immeuble ou d’un magasin, ceux qui sortent ont la priorité, si la porte est unique et de largeur insuffisante pour permettre un flux dans les deux sens. Peut-être ce n’est pas le cas en France.)
- En règle générale, la planète Terre préfère les giratoires dans lesquels on applique une priorité à gauche afin de faciliter la circulation, c’est-à-dire que la priorité est donnée aux véhicules circulant sur l’anneau. Les giratoires étant en nombre très réduit avant 1990, on s’en foutait, mais de nos jours, partout au monde, on applique « la priorité moderne », pas « la priorité française » !
- La place de l’Étoile (officiellement place Charles-de-Gaulle) est l’exemple le plus classique et le plus typique de l’imbécillité française en matière de réglementation routière !
- On dit que la France a mis en place environ la moitié des carrefours giratoires dans le monde. Heureusement, le décret du 30 janvier 1991 modifiant le Code de la route a instauré la priorité aux véhicules circulant dans l’anneau d’un rond-point. Avant cette date, la priorité était généralement donnée à ceux qui entraient dans le rond-point.
- Carrefour giratoire ou rond-point, s’il y en a des feux rouges ou toute autre signalétique, alors peu importe la classification ou la priorité prévue par la loi, ce sont les feux de circulation qui font la loi ! C’est par exemple le cas dans le fameux Columbus Circle à New York, mais aussi le cas, que je connais mieux, de la Roumanie. En 2020, les neuf plus grandes villes de Roumanie avaient au moins 600 carrefours giratoires (« sensuri giratorii » qu’elles se nomment) dans lesquelles on applique la règle des ronds-points, c’est-à-dire la priorité à gauche. Toutefois, parce qu’autrefois la Roumanie avait imité la France (dois-je reprocher ça à mon père ?), elle a gardé quelques grands giratoires « à l’ancienne », en donnant la priorité aux ceux qui y entrent. C’est le cas dans Piața Arcul de Triumf, Piața Charles de Gaulle (anciennement Piața Aviatorilor) et Piața Presei Libere (anciennement Piața Scânteii) à Bucarest : la priorité est pour ceux qui entrent dans l’anneau, et elle est indiquée par des feux des circulations doublés par de panneaux de priorité. Au moins, les feux rouges limitent le flux incident de véhicules, donc on évite le chaos qui règne dans la place de l’Étoile à Paris.
Mais la particularité française (l’exception française) persiste dans la signalétique utilisée. Ainsi, le panneau de signalisation de carrefour à sens giratoire AB25, institué en 1984, annonce aujourd’hui dans la plupart des cas une intersection où le conducteur est tenu de céder le passage aux véhicules débouchant de l’anneau central par sa gauche, c’est-à-dire un rond-point ! Pour éviter la confusion, les rond-points « véritables » ont des indications supplémentaires de priorité :
Ou bien (pannonceau M9c) :
Ou encore (pannonceau M9z) :
L’ancien panneau B21f, qui était placé dans le carrefour, sur l’îlot, n’existe plus depuis 1984, alors qu’il est toujours en vigueur en Belgique, en Suisse, en Allemagne, en Italie, en Roumanie, etc. :
En France, il a été remplacé par le panneau B21-1 :
Sur l’îlot, d’autres pays, comme l’Allemagne, l’Italie, la Roumanie, utilisent normalement cet autre panneau :
Mais il n’y a pas que ça. Le panneau AB25 (triangle rouge) qui en France est placé à l’entrée du rond-point ou du giratoire n’est utilisé dans le reste de l’Europe que rarement :
- seulement pour une signalisation avancée (obligatoire en dehors des villes en Italie) ;
- ce panneau n’existe pas en Allemagne !
Bon, c’est le spécifique français, l’identité française, quoi.
Certes, il y en a d’autres différences nationales en matière de circulation dans un rond-point, notamment dans ceux à plusieurs voies de circulation :
- En Belgique et en Roumanie, le rond-point est considéré comme une chaussée distincte des chaussées adjacentes et qui a priorité sur ces dernières, mais une chaussée tout de même. À l’intérieur du rond-point, les mêmes règles s’appliquent que pour toute autre chaussée, sauf qu’il n’y a pas d’obligation de circuler le plus près possible du bord droit (c’est plutôt le contraire, plus on quitte le rond-point tardivement, plus on doit se positionner vers le centre). Il y a l’obligation de céder le passage aux autres usagers lorsqu’on effectue une manœuvre (un changement de voie étant une manœuvre), l’interdiction de dépasser par la droite, etc., et les conducteurs doivent mettre le feu indicateur de direction pour quitter un rond-point. (En Roumanie, une clarification a été ajoutée dans le Code de la route, mais même en son absence, c’était comme en Belgique.)
- En Allemagne et en Roumanie, certains giratoires sont dessinés de façon à ce que l’on n’ait pas à changer de voie, mais dans ce cas, il faut choisir la bonne file dès que l’on entre sur un giratoire !
En guise de point final
Je ne déteste pas la France et le Français, bien le contraire. Mais là où la sottise est évidente…
Bon, mettons que je suis une sorte de Gargamel, ok ? Grincheux, jamais content, mangeur de lutins…
Ça m’écœure de constater à quel point les gens sont des imbéciles. Certes, il s’agit d’une nation orgueilleuse, arrogante (les Français ne sont pas aussi arrogants que les Américains, mais ils n’en sont pas loin), et avant tout, ingouvernable. Les « gilets jaunes », mai 1968, et tout ça. Je ne comprends toujours pas comment peut-on célébrer l’abomination qui fût mai 1968. Ils n’ont même pas demandé la légifération de l’avortement (ce que j’aurais demandé si j’étais à leur place), et ce sera Simone Veil, de centre-droite, qui l’obtiendra pour ces débiles, en 1975. Les rois des cons, ces étudiants.
Mais pour moi, la France, c’est la culture et la civilisation. D’hier, pas d’aujourd’hui. D’avant Mitterrand, si vous voulez. D’avant la racaille. D’avant les zones de non-droit.
La (vieille) littérature, la cinématographie (d’hier), la musique (d’autrefois), les bandes dessinées (mais pas les mangas)… Dans mon enfance, je ne connaissais que Vaillant, le journal de Pif et Pif Gadget, puis à partir de 1986, d’autres albums sans aucun rapport avec Pif. Plus tard, j’ai découvert (et je récupère toujours !) l’univers mirobolant de la BD franco-belge, avec ses hebdomadaires défunts ou encore vivants, avec ses milliers et milliers de personnages, dont certains ont été réédités en album récemment. Même en Allemagne, on a traduit énormément de bédés franco-belges.
Mais là, je ne peux nullement mâcher les mots. Quand on est con, on est con.
Si on répond juste à la question posée : Pourquoi Jean Richard l’accuse-t’il de mentir ? Réponse : A cause du “fameux” panneau de fin de route a caractère prioritaire.
Si on va plus loin et que l’on rajoute : a-t-il raison ? Évidement non. Mais cette deuxième partie de la question n’est pas demandé dans la BD.
Ah, là c’est beaucoup demandé ! Je ne sais pas ailleurs, mais en France c’est une horreur ! Les trois-quart des conducteurs font n’importe quoi et prennent n’importe quelle file quitte à vous faire une queue de poisson pour prendre la sortie. Et beaucoup aussi ne mettent aucun clignotant, ni pour entrer ni pour sortir, si bien que vous devez “deviner” ce qu’ils vont faire ou pas.
En France, ces endroits sont presque des zones de non-droit. Une horreur.
Vous vous obstinez à chercher un sophisme là où il n’y en a pas. La solution officielle implique que tout le monde croyait à un refus de priorité, mais que ce refus était impossible, car la Cox devrait céder le passage. Sauf que c’est faux.
Pratiquement, Jean Richard dit : sachant que vous n’aviez pas la priorité de passage, vous avez foncé dans le carrefour pour vous faire écraser et demander d’être dédommagé. Sauf qu’il était dans son droit de foncer !
Maintenant, vous ne comprenez pas comment fonctionne une telle énigme. Étiez-vous, comme Marine Le Pen, interdit de lire Pif ?
En Roumanie, tout le trafic est une zone de non-droit. Mais sur le papier, il y a des lois, un Code de la route, une police nationale, etc.
Trouvé à Yvetot (76), mais assez typique pour la France, pour le Québec (où l’on en trouve beaucoup pire !), pour le style français de penser les réglementations :
Sens interdit, sauf pour les riverains, les livraisons et les véhicules de service, dans tous les cas dans la limite de 3,5 tonnes, qui peuvent circuler.
Remarque : ni le Code de la route ni l’arrêté interministériel sur la signalisation routière ne définissent « sauf service » et ni même le mot « service », alors quels véhicules de service public sont envisagés, c’est selon l’arrêté local, si celui-ci existe. Ambiguïté à la française.
Acceptable, à part que le sens unique n’est pas du tout unique. Il y en a, très probablement, des véhicules circulant dans l’autre sens.
Pour que le sens soit unique, le panneau B0 « circulation interdite dans les deux sens » devrait être utilisé au lieu du panneau B1 « accès interdit », car B1 implique l’existence d’une voie à contresens. B1 plus « sauf », ça donne un trafic dans les deux sens, bien que pas pour tout le monde !
Ça m’agace en Allemagne aussi quand, au cours des travaux, on met parfois le panneau 250 (B0 « circulation interdite dans les deux sens ») au lieu du panneau 267 (B1 « accès interdit »), alors qu’en réalité il y a du trafic sortant de la rue, en venant de l’autre sens. Cette signalisation incorrecte peut conduire à des problèmes de sécurité, car lorsque quelqu’un voit un panneau « circulation interdite dans les deux sens », il ne s’attend pas à un trafic venant à son encontre ! (Sauf s’il y en a des exceptions, comme dans le cas déjà vu.) Dans le cas français, seulement le panneau C12 « circulation à sens unique » est inutile et incorrect, car, si le seul trafic est celui excepté par les divers « sauf », alors on devrait avoir un panneau B0, pas B1. Par contre, si le trafic dans l’autre sens est normal, ou défini par un autre jeu de panonceaux « sauf », alors sur la rue en cause il y a du trafic dans les deux sens, et quiconque présume que circulation se fait à sens unique risque de provoquer des accidents !